Entretien avec Lionel Blaise, coordinateur du CHRS Arelia








L’association Arelia et L’Autre Canal ont initié un projet en collaboration avec les Centres d'Hébergement et de Réinsertion Sociale ARELIA, ainsi que les CHRS des sites Libération et Paul Villard. Dans le cadre de cette initiative, les participant·es et l’artiste Lina Bijou ont été invité·es à s’engager ensemble dans un processus créatif, allant de l’écriture à la composition musicale, jusqu’à l’enregistrement et l’interprétation en live. Les équipes des CHRS ont également pris part au projet, accompagnant les résident·es dans la création des morceaux. Entretien avec Lionel Blaise, coordinateur du CHRS Arelia.
Comment êtes-vous devenu partenaire dans cette action culturelle avec L'Autre Canal ?
Cette collaboration est née d’un échange entre L’Autre Canal et Arelia. Un collègue d’Arelia, Pascal Larcher, m’a présenté le projet, et j’ai assisté à la première rencontre animée par Lorraine Gasser. Dans le cadre de l’Action GSA, nous avions, pendant plusieurs années, organisé un atelier musique, et trois membres ont manifesté leur intérêt.
Il y avait également la volonté d’expérimenter une approche professionnelle dans un cadre différent de l’intra-associatif, afin de motiver les participants à vivre cette expérience. Ce type d’initiative s’inscrit pleinement dans mes missions au sein du GSA, car il donne du sens à notre métier et à nos projets avec les personnes, tout en favorisant des progrès bénéfiques dans leur parcours de vie.
Quelles ont été les étapes principales de votre collaboration avec L'Autre Canal ?
Pascal, des collègues et moi nous sommes organisés pour les transports et avons accompagné le groupe, lors de chaque séance avec Lina Bijou. (Rappel des dates, soutien auprès du groupe, participation aux ateliers, organisation des 2 mini concerts de restitution). Je me suis occupé également de la communication en interne et externe autour du déroulement du projet, pour le valoriser et des deux restitutions qu’il y a eu à Arelia, avec une collègue, secrétaire de Direction du pôle AHI, pour valoriser ces initiatives et les participants.
Selon vous, quels sont les apports principaux de cette action pour les participants ?
D’abord la découverte d’un endroit professionnel qui a motivé et valorisé les participants, ensuite un encadrement bienveillant qui leur a donné de la confiance en eux, tout au long du projet, qui leur a permis de se dépasser, de sortir de leur confort, d’écrire, d’écouter, de travailler avec des professionnels des métiers de la musique, de se produire sur scène, et enfin de créer ensemble, une notion de groupe, solidaire et déterminé à réussir, un projet, un rêve pour certains.
















Pensez-vous que ces actions culturelles répondent à des besoins spécifiques des publics ciblés ? Si oui, lesquels ?
À travers cette action, nous constatons des axes fondamentaux de ce qu’est l’action sociale : Sens de l’accueil, confiance en soi, confiance aux autres, soutien, organisation, implication, écrire, créer, s’exprimer, se donner les moyens, travailler, motiver, féliciter, se dépasser, aller jusqu’au bout d’une idée, d’un projet dans un cadre bienveillant mais exigeant et avec une notion de « faire ensemble » pour le bien du groupe et de chaque personne et en respectant le rythme de chacun.
Au travers de ces actions, autour de la musique, de l’art, ou du sport, toutes les valeurs et actes développés, permettent à chaque participant d’acquérir ou de retrouver des aptitudes, compétences, des savoirs faire et être, oubliées ou enfuies souvent, par la turpitude de la vie, les accidents de parcours, les désillusions aussi.
Toutes ces acquisitions, permettent à chacun, de se retrouver, d’être valorisé, de reprendre le gout de l’effort et du rythme de vie, de se projeter, éléments indispensables pour une reconstruction, en vue d’une insertion ou réinsertion sociale et professionnelle. Lorsqu’une expérience à vivre comme celle-ci se réalise, chaque participant a la même réflexion, si l’action est bien préparée : « Maintenant que je me suis engagé, il faut réussir et ne pas se planter ! Pour moi, les autres du groupe et ceux qui m’ont fait confiance »
Qu’est-ce qui a motivé les participants à y participer ?
De mes retours auprès d’eux, de nos discussions tout au long de l’action :
- Une envie de découvrir, d’essayer
- Une valorisation personnelle
- Une dynamique de groupe
- Le gout de l’effort, du dépassement de soi, de la volonté de réussite
- Un cadre bienveillant
- Une volonté de réussir
En quoi cette expérience a-t-elle changé votre regard sur la culture ou la création artistique ?
Tous les participants avaient déjà perçu l’importance de la culture, que ce soit en tant que spectateurs ou acteurs, à travers leur parcours personnel ou leur accompagnement avec Arelia. C’est cette sensibilité qui les a conduits à s’inscrire dans le projet. En s’engageant dans une action concrète, ils découvrent des passions qui sont devenues de véritables métiers, avec leurs exigences, leurs satisfactions et les compétences qu’ils impliquent. Cette immersion dans le domaine du spectacle leur permet d’acquérir des savoir-faire transférables à d’autres professions et, plus largement, à leur projet de vie sociale et professionnelle. C’est une manière de découvrir l’art de l’intérieur, en étant pleinement impliqué et concerné, au-delà du simple regard de spectateur.
















Questions aux participant·es
Qu’avez-vous appris en participant à cette action ?
- « Que je n’ai pas eu peur de m’engager dans quelque chose que je ne maitrisais pas »
- « Que cela demande des efforts, une vraie volonté, un réel engagement, pour soi et les autres membres du groupe »
- « On démarre ensemble, on va jusqu’au bout ensemble »,
- « Que lorsque quelque chose est bien organisé, c’est mieux ».
- « Que je pouvais me dépasser et vaincre mes peurs »
- « Que je suis finalement fier de moi et que ça va me booster dans mon avenir perso »
- « Que j’ai appris à me faire de bons amis »
- « Que nous allons rester en contacts, nous revoir, pour essayer de poursuivre ensemble cette activité »
- « Qu’on pouvait me faire confiance »
Est-ce que cette expérience vous a aidé à développer de nouvelles compétences ou aptitudes (artistiques, sociales, professionnelles, etc.) ?
« Evidemment, sur tous ces points mais aussi, à titre personnel, de me faire confiance et d’être plus motivé, dans ma vie, mes projets »
Pour finir, y a-t-il un moment particulier qui vous a marqué ou touché ? Pourquoi ?
- « La première rencontre était un peu difficile car je ne connaissais personne. Mais Pascal et Lionel étaient là, et ça m’a rassuré »
- « J’ai aimé, chaque séance et le résultat au final, j’ai juste une envie c’est de recommencer un nouveau stage ensemble »
- « J’ai eu souvent des appréhensions, créer un texte et le lire devant les autres, faire les exercices autour de la voix, des efforts qu’il faut faire pour être prêt, des échauffements, d’enregistrer ma voix dans un studio pro, de monter sur scène et chanter devant 40 puis 200 personnes, mais au final, quel fierté d’avoir dépassé toutes mes appréhensions et d’avoir assuré, de l’avis de tous ».
- « Je suis fier de moi et fier de mes amis du groupe »
- « C’est un peu difficile à vivre ce moment où l’action s’arrête, on était dans une bulle et on aurait tous voulu continuer. Mais on s’apprécie et on va se revoir »
- « On a rencontré Lina qui est une personne formidable qui nous a vraiment donné envie de réussir . On a eu un super contact avec elle, c’est une pro mais très humaine »
- « Mattéo, qui est un gars super sympa, et il était cool avec nous, comme toutes les autres personnes de L’Autre Canal. Ça fait plaisir »
- « À la dernière séance à L’Autre Canal, quand on a déjeuné ensemble, dans la cafétéria où viennent habituellement manger les artistes et les techniciens qui viennent en concert. C’était trop « classe » ! »
- « Ils sont super cool et pro à L’Autre Canal. Je ne connaissais pas, mais je vais venir de temps en temps aux concerts avec les billets solidaires ».
- « À Arelia, quand, après avoir interprété notre titre, tout le monde s’est levé en nous applaudissant. J’y croyais pas. Je m’en souviendrai toute ma vie »